L’homme n’est donc pas au début dans la nature.
L’homme naît dans la nature. La nature le fait naître. L’homme est un produit de la nature, un produit de la différenciation du capital intersubjectif circulant, de la matière intersubjective circulante. Il est lui-même matière anthropologique circulante, le fameux et drolatique MAC du MIC, lui-même en plein micmac. La nature, société civilisée, développée, développant son mode de production écologique, produit l’homme comme elle produit déjà depuis des milliards d’années des formes diverses.
L’homme n’a rien d’original.
Il suit, comme toute la matière en évolution, le graphe dynamique de l’easp, être avoir savoir, pouvoir.
Durant des millions d’années, l’homme cherche ses variables d’ajustement pour dépasser pratiquement son inadaptation au monde. Il ne fait, de ce point de vue, que suivre un processus bio-génétique. Pour s’intégrer, le mimétisme, le bio-mimétisme, l’épigenèse imposent des acquisitions des innés.
L’épigenèse lui permet d’ajuster son organisme micro-cellulaire. L’observation magmatique de la société de la civilisation de la nature le conduit à imiter des pratiques sociales mises au point par le corps de la nature. Il est pris dans les mouvements dynamiques de ce corps constitué. Sa prise en considération du vivant est de premier niveau. Ce que les siècles dits modernes nommeront une prise de conscience n’existe pas. Il y a pour l’homme prise d’existence, praxis ontogénétique. Cette surdétermination impose à l’homme de longs temps, de longs espaces, de longs espace-temps rythmés par le corps en croissance de la nature.
Chaque partie du corps de la nature contribue, par ses variables d’ajustement, à réajuster constamment l’être naturel au monde matériel.
Ce matérialisme géo-historique, ce mapisme originel, n’est pas un marxisme anarco-poétique, bien sûr c’est certain. Il n’en demeure pas moins que l’homme est un produit tardif (certes) de la nature.
Pourquoi le corps de la nature enfante-t-il l’homme ? À quoi cela lui sert-il ?
L’homme n’est qu’un élément, parmi d’autres, participant au tout du premier mode de production et de consommation, le mode écologique.
Le corps civilisé de la nature lui impose toutefois une différenciation singulière, spécifique. Laquelle ?
Toute la nature est un organisme génétiquement modifié, se modifiant constamment. Cette modification est d’ajustement, il ne faut pas l’oublier. La nature demande donc à l’homme une participation singulière à cet ajustement. L’homme est donc une variable d’ajustement comme une autre. Là n’est pas sa singularité.
Sa géo-histoire, localisée, son GPS le fixe dans une proximité stricte, dans un espace-temps délimité.
Les oiseaux, par exemple, ou les êtres vivants aquatiques, pratiquent déjà des migrations acculturantes. Ces acculturations enrichissent le corps de la nature, constamment. Le corps de la nature se métisse ainsi se bâtardise. Le barbare est diachroniquement intégré constamment. En ce sens, dans la civilisation naturelle, le barbare n’existe pas, pas plus que le sauvage, bon ou mauvais.
La nature développe toutes ses capacités d’ajustement. Elle donne à chaque élément du tout la virtuelle possibilité pragmatique de faire aboutir son protocole biogénétique. L’acquisition de cet inné, c’est la culture géo-historique dépendante en toutes les instances des modes de production économique et démographique. Le premier mode de production, donné, c’est le mode de production écologique où producteurs et consommateurs se confondent dans une superposition cohérente, co-errante. La nature, société culturelle évoluée, civilisation universelle du premier communisme, organisme organisé supérieurement, la nature en appelle donc à l’homme pour lui demander de participer au développement de ce premier mode de production écologique et communiste.
La nature investit dans cette nouvelle force de progrès qu’elle met en activité : l’homme lui-même. Pour faire cela, la nature matérielle dote l’homme d’un corps spécifique. Ce corps permet, par la position sur deux pattes, un déplacement singulier. Cette capacité permet un déplacement rapide, augmente les possibilités de pêche, chasse et cueillette. Elle augmente aussi les capacités de nomadisme. La U-caverne n’est pas entièrement et constamment une sédentarisation. Le nomade rend itinérante la U-caverne. Mais cette bipédie ne lui est pas propre. Un oiseau, un écureuil, par exemple, fait de même. Deux caractéristiques autres singularisent le corps de l’homme.
Sa main, par la position du pouce, permet une préemption vigoureuse des objets. La force de prise en main permet une transformation singulière des objets en outils.
On n’a jamais vu une girafe tailler un silex.
Ensuite la nature dote le corps de l’homme d’un cerveau dans les capacités de croissance neuronale sont démultipliées.
Le corps de l’homme va avoir à reconnaître cette croissance du cerveau dit reptilien. L’easp – l’être avoir savoir pouvoir – peut s’épanouir. Via le bio-mimétisme, donc l’épigenèse, via l’imitation pratique des systèmes de cohérence inter-objective, sociale, via une logique du concret de la praxis, via des possibilités cognitives puissantes, la nature pousse donc l’homme sur la voie d’expérimentations innovantes.
Ce que les peuples développés du mode de production écologique premier ce que ces peuples vivants depuis des milliards d’années demandent à l’homme, c’est de tester ce chemin de la praxis.
La nature demande donc au corps humain de pousser l’expérience d’un organisme génétiquement modifié.
Modifier à l’extrême, auto modification géo-historique.
Cette « organisation» du corps de l’homme implique un hyperréalisme radical contradictoire : l’homme doit mettre au point et pratiquer une dénaturalisation et, partant, une dénaturalisation passant par une dématérialisation.
Formidable coup de tonnerre épistémologique.
Il faut l’observer. L’homme a donc pour fonction d’être contre-nature par idéalisme dématérialisant.
C’est effarant de complexité dialectique.
La nature demande à l’homme de la prendre en considération. Elle est une entité à part entière. Le cosmos se naturalise. L’homme, en se mettant à distance –sur injonction naturaliste– s’extrait lui-même du procès de civilisation du mode de production écologique.
Ce contre-nature idéologique, c’est la mission anthropologique. L’homme doit s’écarter, expérimenter cette mise à l’écart et il doit en rendre compte. La position est fort inconfortable. C’est la première fois qu’un élément du cosmos, du tout, a pour mission objective de codifier la matière intersubjective.
Circulante, le MIC, secret donc un MAC, une matière anthropologique circulante. L’homme doit sortir de ce micmac. Mais avant que de devenir l’homme, l’homme est d’abord un corps naturel, humanisé. Entre le corps de la nature et le corps de l’homme, des médiations s’établissent. Ces médiations sont, en un premier temps, mises au point par la civilisation de la nature elle-même. Le corps de l’homme ne trouvera son identité propre qu’à l’aboutissement de cette double complexe médiation, à trois faces réfléchissantes : la nature, le corpus côté des médiations de mise à distance et enfin le corps de l’homme, en voie de dénaturalisation, via une dématérialisation idéaliste. Cette codification médiatique ne peut être qu’une déconnade. Décoder, déconner. Traduire, c’est trahir.
Il n’y a pas de « vérités », il n’y a que des faits, contestables. Le consensus sur un fait, la convention n’est qu’un accommodement de société. Un pis allé d’existence sociale, le point d’arrêt consensuel d’une fatigue épuisante de recherches de sens. Épuisement du corps de l’homme et du corps social constitué, parce que la mise au point des médiations codifiées s’effectue sur la longue durée. On entend là au cours de millions d’années. La nature demande à l’homme de vérifier la qualité du mode de production écologique. La nature demande au corps de l’homme s’il existe un monde meilleur.
Le corps de l’homme s’attelle à cette recherche fondamentale. Mais sa position épistémologique, géo-historique, cet entre deux mondes qu’il explore (pour la première fois, c’est à re-souligner) le met en porte-à-faux. Cette position idéologique le contraint en effet à n’être lui-même qu’un anachronisme. L’anthropologie ne sait être qu’un anachronisme, anachronique. La mise à distance, la dénaturalisation de la nature oblige à cet anachronisme de la première fois. La première fois devient alors pour le corps de l’homme, pour l’homme ensuite, une éternelle seconde fois.
Là est l’anachronisme.
L’homme ne peut se tourner vers son passé pour le dépasser, le trépasser, que par voie anachronique. C’est inévitable.
Il est en plein micmac.